Mai 3

L’islam : faiblesses et force

Après avoir jugé l’islam selon ses racines et selon ses fruits, voici, pour conclure, un bilan sur sa force et ses faiblesses.

I – Les faiblesses de l’islam

1. Faiblesse morale de l’islam

Le relâchement moral de l’islam, qui tient à la vie corrompue du fondateur, ne lui permet de constituer qu’une forme de civilisation inférieure ; il rend cette religion radicalement incapable de progrès.

2. Faiblesse doctrinale de l’islam

L’absence totale de preuves de la mission du fondateur [qui s’est imposé par les armes, et non par des miracles et des prophéties], rend la foi complètement irrationnelle. Elle établit une complète opposition entre la croyance à l’islam et le développement philosophique de la pensée.

La raison peut sans abdiquer se soumettre à une religion qui repose sur des preuves ; l’intelligence humaine peut se laisser enseigner par une autorité qui montre qu’elle est divine. Mais se soumettre à l’autorité d’un imposteur ou d’un fanatique, croire sur une affirmation sans aucune démonstration, c’est une véritable abdication de la raison. De là est résulté un grand affaiblissement de la force doctrinale de l’islam pendant la courte époque du développement intellectuel de l’empire musulman, et plus tard une réaction de croyance aveugle qui a anéanti tout mouvement de la pensée.

Marché aux esclaves en Irak en 20143. Faiblesse sociale de l’islam

  • L’union complète du pouvoir spirituel et du pouvoir temporel, qui est aussi un des principes de l’islam, constitue encore une grave imperfection sociale et religieuse ; elle fait de la religion une affaire de législation et de forme extérieure et publique, bien plus que l’œuvre libre de la conscience. Elle est la source du despotisme le plus absolu.
  • L’esclavage, conséquence nécessaire des harems des sultans et des pachas, et de l’état inférieur de la femme, est encore une des plaies de la société musulmane.

L’islam, capable d’élever les barbares et les païens jusqu’à un faible niveau de civilisation, est par tous ces motifs absolument stationnaire et hostile au progrès. C’est ce que sont obligés de reconnaître même ses partisans. Mais être hostile au progrès, quand le progrès existe, quand, à côté de l’islam stationnaire, se trouve la société chrétienne qui marche vers son idéal, qui développe le cœur, la conscience et la raison de l’homme, n’est-ce pas être funeste et nuisible à l’humanité ?

Si donc l’islam est partiellement vrai et bon, en tant que religion monothéiste et ennemie des idoles, il est funeste et pernicieux par les autres côtés de sa doctrine et de son organisation.

II – La force de l’islam

C’est peut-être ce mélange de bien et du mal qui est le secret de sa force.

Coran madrassah1. Une doctrine simpliste

La doctrine est simple et sans mystères, et par conséquent n’humilie pas l’orgueil.

2. Une morale facile

La morale n’est que trop facile. Sauf la suppression de l’idolâtrie, rien n’a besoin d’être changé dans les mœurs, quelles qu’elles soient, des populations qui embrassent l’islam.

L’union du pouvoir civil et du pouvoir religieux, un paradis sensuel offert sans autre condition au guerrier qui meurt pour sa foi, le droit au pillage et le tribut imposé aux infidèles satisfont certains instincts grossiers.

3. La loi du plus fort

Enfin l’idée principale de l’islam étant de considérer Dieu comme un être fort, du moment que, par la puissance des armes, les musulmans sont vainqueurs, eux-mêmes ou leurs adversaires sentent sa force et reconnaissent Dieu.

James FoleyLa conversion par le sabre fait des musulmans fanatiques et sincères ; on ne pourrait faire de cette manière que des chrétiens hypocrites.

Cette souveraineté de la force est exprimée d’une manière frappante dans certaines objections posées par les musulmans au christianisme. Il y a, disent-ils, trois législateurs, Moïse, Jésus-Christ et Mahomet. Mais Jésus-Christ est inférieur aux autres, il s’est laissé prendre et s’est laissé crucifier. C’est donc une folie de l’adorer et de croire en lui.

4. Une force surhumaine ?

Ces explications de la force de l’islam ont une certaine valeur ; mais sont-elles suffisantes, et la propagation si rapide et surtout la résistance si forte de cette religion à toute décomposition du dedans comme à toute destruction par le dehors, ne supposent-elles pas une cause surnaturelle [1] ?

La question est douteuse, je la laisse à l’appréciation de chacun, tout en penchant pour l’hypothèse que les causes humaines ne sauraient expliquer une institution aussi grande et aussi vivace.

Seulement, quelle pourrait être cette puissance surnaturelle,

  • ennemie du progrès de l’humanité et du christianisme,
  • soutenant une religion peu soucieuse de la morale,
  • employant la force brutale,
  • excitant l’ambition et la cupidité,
  • et courbant la raison sous le joug d’une autorité sans preuves ?

Ce ne saurait être la puissance divine ; ce ne saurait être que celle de ce prince de ce monde à qui appartiennent les royaumes de la terre, et que l’Évangile appelle l’esprit immonde et le séducteur.

Malgré la vérité partielle de l’islam, s’il faut une puissance surnaturelle pour le soutenir, ce ne peut être que la puissance de l’ennemi de Dieu et de Jésus-Christ, de l’esprit menteur dont la parole ne mérite pas d’être crue. Ce ne saurait être une puissance divine.

D’après Paul de BROGLIE (1834-1895),
Problèmes et conclusions de l’histoire des religions,
Paris, 1885, p. 237-239.

[1] Au sens strict, le mot « surnaturel » se rapporte à Dieu, qui est seul est au-dessus de toute nature créée. – Ici, le mot est pris en un sens plus large et désigne une cause supérieure à la nature humaine : ce peut être un ange ou un démon.