Avr 21

Triomphe de Jésus sur l’Antéchrist

Victoire sur l'AntéchristLa magnifique vie de Jésus du père Augustin Berthe (Jésus-Christ, sa vie, sa passion, son triomphe) s’achevait par trois chapitres :
Triomphe de Jésus sur les juifs
– Triomphe de Jésus sur les païens
– Triomphe de Jésus sur l’Antéchrist

Malheureusement, des rééditions récentes ont supprimé deux de ces trois chapitres. Voici le dernier (Triomphe de Jésus sur l’Antéchrist).
Télécharger : Le triomphe de Jésus sur l’Antéchrist 

La veille de son crucifiement, avant d’entrer au jardin des Olives, Jésus disait à ses apôtres : « Ayez confiance, j’ai vaincu le monde» Et, après huit siècles écoulés, huit siècles d’atroces persécutions, en dépit de Satan et de ses suppôts, il avait réellement vaincu le monde : le monde juif, le monde romain, le monde barbare. Ego vici mundum.

Royauté sociale de Jésus

Il régnait sur un immense empire qu’on appelait la chrétienté. Les rois se prosternaient devant ce monarque suprême ; leurs lois se basaient sur son Évangile ; les peuples vivaient de sa vie, s’efforçant de reproduire ses divines vertus. A partir de Constantin, pendant mille ans, l’Europe se couvrit d’églises et de monastères où retentissaient perpétuellement les louanges du Christ-Sauveur. Les Benoît, les Bruno, les Dominique, les François d’Assise multipliaient les ordres religieux, véritables pépinières de saints et de martyrs dévoués corps et âme à la gloire de Celui qu’ils aimaient mille fois plus qu’eux-mêmes. Et tous les sujets du Seigneur Jésus, rois, chevaliers, prêtres, religieux, simples fidèles, savants ou ignorants, pleins de foi et d’amour malgré leurs passions, redisaient la même prière et travaillaient au même but. « Que votre règne arrive ! Disaient-ils, que votre nom soit glorifié dans le monde entier, que votre volonté, ô divin Maître, s’accomplisse sur la terre comme au ciel ! »

Christ-Roi - La Bourgonnière (Maine et Loire)Soldats de Jésus, défenseurs de son royaume, les chrétiens regardaient comme leurs ennemis personnels les ennemis du Sauveur, hérétiques, schismatiques, apostats. Quand Mahomet et ses musulmans se lancèrent contre les fidèles du Christ, menaçant d’exterminer l’Église de Dieu, ils rencontrèrent partout, en France, en Espagne, en Afrique, en Orient, les chevaliers de la croix qui, pendant de longs siècles, au cri de : Dieu le veut ! versèrent leur sang pour Jésus-Christ, et finirent par écraser, à Lépante, les hordes mahométanes. En même temps, à la suite de Colomb, des légions de zélés missionnaires traversaient des océans inconnus pour ajouter au royaume du Christ les continents nouvellement découverts. Déjà l’on saluait l’aurore du grand jour où, conformément à la prédiction de Jésus, il n’y aura qu’un seul troupeau et un seul pasteur.

Apostasie des nations

Mais les chrétiens oubliaient cette autre prophétie du Sauveur qu’avant son triomphe complet sur ses ennemis et son second avènement sur cette terre, les nations substituées aux Juifs déicides passeraient elles-mêmes par une crise plus terrible que la persécution des empereurs romains. Le Maître n’avait-il pas dit, l’avant-veille de sa mort :

Le monde passera par une tribulation telle qu’on n’en a jamais vu et qu’on n’en verra jamais de semblable. Dieu en abrégera la durée par amour pour ses élus, car en ce temps s’élèveront de faux christs et de faux prophètes, lesquels se signaleront par de tels prodiges qu’ils induiraient en erreur, si c’était possible, les élus eux-mêmes [1].

Et commentant aux premiers chrétiens cette parole du Sauveur, Paul annonçait « qu’un mystère d’iniquité se formait dans l’Église de Dieu [2] », c’est-à-dire des hérésies, des schismes, des sectes impies qui conspireraient contre l’Évangile et la croix de Jésus. Il voyait « surgir vers la fin des temps des novateurs, ennemis de la saine doctrine, qui tourneraient le dos à la vérité pour s’attacher à toutes sortes d’erreurs [3]. Et alors, s’écriait-il, éclatera l’apostasie des nations, alors apparaîtra l’homme de péché, le fils de perdition, le grand adversaire qui s’élèvera au-dessus de tout ce qui s’appelle Dieu, jusqu’à s’asseoir dans le temple pour se faire adorer comme le seul Dieu [4] ». Ce sera la revanche de Satan, son dernier combat contre son vainqueur, mais aussi sa suprême défaite. « D’un souffle de sa bouche, Jésus exterminera l’Antéchrist [5] », et tous les suppôts de cet impie, témoins de sa chute, reconnaîtront enfin l’Homme-Dieu, et le proclameront Roi des rois et Seigneur des seigneurs.

La Renaissance

François Ier (1494-1547) par Jean ClouetOr, au moment fixé par Jésus pour la grande épreuve des nations, il fut donné au démon d’ouvrir le puits de l’abîme, et il en sortit une épaisse fumée qui aveugla les esprits, leur déroba les clartés de l’Évangile, et les replongea dans les ténèbres de l’ancien paganisme. Fascinés de nouveau par les beautés matérielles dont Satan se sert pour corrompre les âmes, les chrétiens perdirent de vue la beauté surnaturelle et les célestes vertus qui avaient changé la face du monde. Oublieux de sa gloire, la société créée par l’Esprit divin se pervertit jusqu’à regretter la civilisation grecque et romaine. On la vit relever, en face du Crucifié, les statues impures des dieux et des déesses de l’antiquité, célébrer solennellement les saturnales des païens, abandonner les mystères qui représentaient la Passion du Christ pour se repaître des lubricités scandaleuses, anathématisées par l’Évangile. On appela divins les poètes, les orateurs, les philosophes de Rome et d’Athènes : on étudia leurs livres avec plus de soin que ceux des prophètes et des apôtres. Les produits les plus merveilleux de l’art chrétien, même nos sublimes basiliques, furent traités de barbares. Il fut convenu que la lumière et la beauté avaient disparu du monde avec le paganisme, et que les dix siècles du Moyen Age, illuminés par de sublimes génies, comme les Augustin, les Jérôme, les Chrysostome, les Bernard et les Thomas d’Aquin, illustrés par des chefs comme Charlemagne et saint Louis, sanctifiés par les vertus héroïques des grands fondateurs d’ordres et de leurs innombrables disciples ; il fut convenu, dis-je, que ces dix siècles s’appelleraient dans l’histoire les siècles d’ignorance et de barbarie, la sombre période des ténèbres, la nuit du Moyen Age. Afin de caractériser ce mouvement de retour aux idées, aux mœurs, à la civilisation païennes, on lui donna le nom de Renaissance. De même, pour marquer le nouvel esprit qui allait présider désormais aux destinées du monde, l’histoire, à partir de ce moment, prit le nom d’histoire moderne. Elle aura pour principal objet de raconter les péripéties de la grande apostasie des nations, c’est-à-dire les faits et gestes de l’Antéchrist et de ses précurseurs.

Luther (1517)

Martin LutherA la Renaissance païenne, première étape des nations chrétiennes dans la voie de l’apostasie, succéda, au seizième siècle, la Réforme protestante. Ayant étouffé l’Esprit de Jésus sous le dérèglement des mœurs et la perversion des idées, la société paganisée leva l’étendard de la révolte contre la sainte Église de Dieu. Sous prétexte de la réformer, un apostat entreprit de la détruire. A sa voix, les rois et les princes se liguèrent contre le Pontife de Rome, chef de cette Église, brisèrent violemment les liens sacrés de l’obéissance qu’ils devaient au Roi des rois, et détachèrent leurs peuples de la chrétienté. En moins d’un siècle, l’Allemagne, l’Angleterre, l’Écosse, la Suisse, la Hollande, les États scandinaves, passaient au schisme et à l’hérésie, persécutaient les catholiques fidèles avec la fureur des empereurs païens, et allumaient le feu des guerres civiles dans l’Europe entière.

Satan triomphait : la prétendue Réforme avait démembré l’Église ; mais, toujours aveugle, il ne voyait pas que les vrais enfants de Dieu s’épuraient et se fortifiaient par le martyre. Aux prises avec les apostats, les chrétiens combattaient jusqu’à la mort pour le triomphe de la foi ; le concile de Trente excommuniait les sectes séparées, opposait à leurs faux docteurs la vaillante Compagnie de Jésus, en même temps que, par des réformes salutaires, il ranimait le clergé et remettait les fidèles sur la voie de la sainteté. De saints et savants religieux s’en allaient au loin, en Amérique, aux Indes, au Japon, en Chine, porter la croix de Jésus-Christ. Et pour montrer aux peuples apostats qu’ils essayaient en vain de ressusciter le vieux paganisme, un pape, Sixte V, ne craignit pas, à la fin de ce seizième siècle, de relever le fameux obélisque du jardin de Néron, dont la base avait été baignée du sang des martyrs, de le surmonter d’une croix, et de faire lire à tous les peuples de la terre cette inscription triomphante : « Voici la croix du Seigneur : fuyez, puissances ennemies ; le lion de la tribu de Juda a vaincu ! Le Christ règne, le Christ commande, le Christ est vainqueur ! »

Voltaire, la franc-maçonnerie (1717) et la Révolution (1789)

Voltaire (par Houdon)L’enfer s’émut, et tous ses suppôts, initiés dans les sociétés secrètes au grand mystère d’iniquité, lancèrent les peuples vers la troisième étape de l’apostasie. Il ne s’agit plus seulement de détruire l’esprit chrétien ni de renverser la papauté, mais d’attaquer directement Jésus-Christ en niant sa divinité et sa royauté, comme l’ont fait les Juifs. Un nouveau précurseur de l’Antéchrist parut dans le monde, entouré d’apostats qui prirent le nom de philosophes. Le chef de cette bande infernale osa se déclarer l’ennemi personnel du Christ. « Écrasez l’Infâme ! » cria-t-il aux sectaires. Et tous ensemble, pendant un demi-siècle, se mirent à battre en brèche la divinité du Sauveur Jésus, la révélation, toute la religion, ses dogmes, sa morale, ses sacrements, son culte. Jamais l’enfer, même sous Néron et Dioclétien, ne vomit autant de blasphèmes contre le Fils de Dieu, autant de calomnies et d’outrages contre les chrétiens. Au nom de la raison, de la liberté, du bonheur de l’humanité, ils organisèrent, sous le nom de Révolution, un état social nouveau, basé non plus sur la volonté de Dieu, mais sur la volonté du peuple, désormais seul souverain et seul législateur.

A la faveur de cette conspiration satanique contre la royauté du Christ, les conjurés se crurent assez forts pour exterminer le catholicisme. Au nom du peuple, dont ils s’intitulèrent les représentants, ils décrétèrent l’abolition de toutes les institutions religieuses, exilèrent ou massacrèrent prêtres et fidèles, abattirent les églises et les autels, supprimèrent tout ce qui rappelait l’ancien culte, la semaine, le dimanche, le calendrier catholique, et jusqu’à l’ère chrétienne. Le passé n’existait plus ; un monde nouveau commençait avec la Révolution.

Depuis un siècle, la Révolution poursuit, avec une infernale ténacité, la déchristianisation des sociétés et des individus. Déjà les nations, en tant que nations, ont cessé partout de reconnaître Jésus-Christ pour leur Roi, le pape pour leur chef, le Décalogue comme la loi suprême. En vertu des principes dits libéraux, les gouvernements font tous profession de ne tenir aucun compte, dans la confection des lois, de la volonté de Dieu. Ils ne reconnaissent d’autre divinité que le peuple souverain, d’autre loi que le bon plaisir des majorités, même lorsque celles-ci légifèrent contre l’Évangile, contre le Décalogue, contre le Christ et son Église. C’est la répudiation du Christ-Roi, dont Charlemagne se disait le lieutenant ; c’est l’apostasie des nations, discession, prédite par l’apôtre saint Paul, et avant lui par David. « Les rois et les peuples conspirent contre le Seigneur et contre son Christ, s’écriait le Roi-prophète. Brisons nos fers, disent-ils, et rejetons loin de nous leur joug odieux. »

Déchristianisation du monde

Timbre - Jules Ferry (1981)Cependant, malgré l’influence puissante des gouvernements athées et de leurs lois impies, il reste encore beaucoup des chrétiens fidèles. La foi d’un grand nombre, il est vrai, s’éteint graduellement, les cœurs se refroidissent, la vertu sombre dans un abîme de scandales ; mais Dieu conserve ses élus, ce qui fait rugir Satan. Pour arracher à Jésus jusqu’au dernier des baptisés, la Révolution emploie aujourd’hui le moyen le plus efficace. Le divin Sauveur a christianisé le monde par l’enseignement catholique ; la Révolution le déchristianise par l’enseignement satanique. Elle arrache violemment les enfants au Dieu de leur baptême, à l’Église leur mère, à leurs parents selon la chair, pour les livrer au démon, le seul maître qu’elle adore. Dans toutes les villes et tous les villages, elle aura désormais une école sans Dieu, d’où seront bannis le crucifix, le catéchisme, la prière. Et afin que tous les enfants sans exception arrivent à l’âge d’homme sans aucune connaissance du Sauveur qui les a baptisés dans son sang, elle ferme l’école chrétienne, rend obligatoire l’école sans Dieu, et force ainsi les jeunes générations à recevoir les leçons de ses professeurs d’athéisme.

Les prophéties de l’Écriture sur l’apostasie générale des nations sont donc accomplies. Comme les Juifs, les peuples s’écrient : « Nous ne voulons plus que Jésus règne sur nous. » C’est le pontife romain, le Voyant d’Israël, bien placé pour juger l’état du monde, qui le constate officiellement :

— Nous en sommes venus, dit-il, même en Italie, à redouter la perte de la foi. L’action des sociétés secrètes tend à réaliser des desseins inspirés par une haine à mort contre l’Église : abolition de toute instruction religieuse, suppression des congrégations, exclusion de tout élément catholique ou sacerdotal des administrations publiques, des œuvres pies, des hôpitaux, des écoles, des académies, des cercles, des associations, des comités, des familles ; exclusion en tout, partout, toujours. Au contraire, l’influence maçonnique se fait sentir dans toutes les circonstances de la vie sociale, et devient en tout arbitre et maîtresse. C’est ainsi qu’on aplanira la voie à l’abolition de la papauté !… et cela ne se passe point seulement en Italie, mais c’est un système de gouvernement auquel les États se conforment d’une manière générale [6]

— La libre pensée, s’écrie à son tour un illustre prélat, ne cache plus le dessein arrêté, tout détruire … Les fidèles ne doivent plus en douter. Si ces desseins se réalisent, leurs églises seront bientôt fermées, leur culte proscrit, les ministres de Dieu violemment chassés, et on verra revenir les jours où les chrétiens payaient de leur liberté et même de leur vie la fidélité à leurs devoirs [7] !

Or, comment finira cette conjuration satanique des nations contre Jésus-Christ et son Église ? Elle finira, comme celle des Juifs et des Romains, par l’écrasement des révoltés et le triomphe solennel du grand Roi qu’ils veulent détrôner. « Le monde vous tiendra sous le pressoir, a dit le Sauveur, mais soyez tranquilles, j’ai vaincu le monde [8]. »

Avant la fin des temps, surviendra la grande tribulation, tribulation telle que les peuples n’en ont pas vu de semblable depuis le commencement, mais j’en abrégerai la durée en faveur des élus. De faux christs et de faux prophètes surgiront alors, dont les prestiges et les prodiges induiraient en erreur, s’il était possible, les élus eux-mêmes. Souvenez-vous de cette prédiction, et gardez-vous de vous laisser tromper par ces imposteurs [9].

L’Antéchrist

Mais qui donc sera le principal auteur de cette grande tribulation ? Un jour, dit saint Paul, jour connu de Dieu seul, quand l’apostasie des nations lui aura frayé les voies,

apparaîtra l’homme de péché, le fils de perdition, l’Antéchrist ou l’adversaire du Sauveur, lequel s’élèvera au-dessus de tout ce qui s’appelle Dieu et s’assoira même dans le temple pour se faire adorer comme Dieu. Véritable personnification de Satan, il trompera les hommes par toutes sortes de séductions, d’artifices et de prodiges diaboliques qui les entraîneront à leur perte. Ils n’ont pas voulu de la vérité qui sauve, c’est pourquoi Dieu les livrera à l’esprit d’erreur et de mensonge.

Ce monstre d’iniquité, ajoute l’apôtre, paraîtra au temps marqué par Dieu, mais le Seigneur Jésus le tuera d’un souffle de sa bouche [10] ».

Saint Jean, dans son Apocalypse, dépeint d’une manière saisissante la lutte de l’Antéchrist contre l’Église et l’extermination des apostats.

Le dragon infernal, dit-il, entra en fureur et s’en alla guerroyer contre ceux qui gardent les commandements de Dieu et rendent témoignage à Jésus-Christ. Et je vis paraître une Bête terrible, forte comme le lion, cruelle comme le léopard. Le dragon lui communiqua sa puissance, et tous les peuples de la terre, après avoir adoré le dragon, se prosternèrent devant la Bête, en disant : « Qui pourra combattre contre elle ? »

Et à l’Antéchrist, personnifié par ce monstre, il fut donné une bouche exhalant l’orgueil et le blasphème. Il exerça sa puissance pendant quarante-deux mois, vomissant d’horribles blasphèmes contre Dieu, contre son Église et contre ses fidèles. Il lui fut également donné de faire la guerre aux saints de Dieu, de les vaincre et de commander en maître aux peuples de toute langue et de toute nation. Tous l’adorèrent, tous ceux dont les noms ne sont pas écrits au livre de vie.

Et je vis une autre Bête qui parlait le langage de Satan. Ce faux prophète opérait toutes sortes de prodiges en présence de l’Antéchrist et le faisait adorer. Il faisait même descendre le feu du ciel sur la terre, et séduisait les hommes jusqu’à leur persuader d’ériger des statues à la Bête [c’est-à-dire à l’Antéchrist]. Il animait ces images, et elles rendaient des oracles, et tous ceux qui refusaient d’adorer ces images étaient livrés au glaive. Petits et grands, riches et pauvres, hommes libres ou esclaves devaient porter sur leur front le signe de la Bête, sous peine de ne pouvoir ni vendre ni acheter [11]. »

Telle sera la persécution de l’Antéchrist « qui s’élèvera au-dessus de tout ce qui s’appelle Dieu et se fera adorer comme Dieu ». Les Juifs déicides l’adoreront comme leur Messie, et tous les apostats seront heureux de continuer, sous un pareil chef, leur guerre satanique contre Jésus-Christ. Cette fois, ils se croiront sûrs d’anéantir l’Église, mais, dans les combats contre Dieu, jamais on n’est plus près de la ruine que quand on chante victoire.

Les deux témoins

Elie et EnochAprès avoir révélé les abominations de l’Antéchrist, le Seigneur fit connaître à saint Jean le dénouement de l’horrible persécution. « Les Gentils, lui dit-il, fouleront aux pieds la cité sainte pendant quarante-deux mois, mais je donnerai mon esprit à mes deux témoins, lesquels prophétiseront, revêtus de cilices, mille deux cent soixante jours. » Ces deux témoins de Jésus, toute la tradition l’enseigne, ce sont Énoch et Élie, enlevés vivants de cette terre pour soutenir la cause de Jésus contre l’Antéchrist. Pendant les trois ans et demi que durera la guerre contre les chrétiens, les deux prophètes reparaîtront en ce monde, prêcheront la pénitence, consoleront et défendront les amis de Dieu. « Ce sont deux oliviers », dit le Seigneur, qui répandent l’onction du divin Esprit ; « deux candélabres » chargés d’illuminer le monde au milieu de ses affreuses ténèbres.

Si quelqu’un veut leur nuire, un feu sortira de leur bouche, qui dévorera leurs ennemis ; si quelqu’un veut les offenser, il périra également par le feu. Ils auront la puissance de fermer le ciel, pour empêcher la pluie de tomber pendant le temps qu’ils prophétiseront, et de frapper la terre de toutes sortes de plaies, aussi souvent qu’ils le voudront.

Et Dieu fit voir à saint Jean les deux prophètes opposant de vrais miracles aux prodiges de leurs adversaires, les appelant à la pénitence, déchaînant contre eux les plus épouvantables fléaux, pestes, famine, guerres sanglantes, les couvrant de plaies semblables aux plaies d’Égypte. Mais, au lieu de répondre à l’appel des deux témoins de Dieu, les apostats, excités par l’Antéchrist, s’endurciront de plus en plus, blasphémeront comme des démons, et convoqueront tous les rois de la terre à livrer le suprême combat au Dieu tout-puissant [12].

Et le Seigneur permettra, pour sa gloire et la confusion des méchants, que ceux-ci triomphent un instant. De même que Jésus, au moment de sa Passion, parut dépouillé de sa force divine, ses deux témoins, leur mission remplie, sembleront abandonnés d’En-Haut. L’Antéchrist, vainqueur, s’en emparera et leur donnera la mort. Leurs cadavres resteront étendus sur la place publique pendant trois jours et demi, sans qu’il soit permis de les mettre au tombeau. De tous côtés les peuples accourront pour contempler ces prophètes si redoutés, maintenant sans force et sans vie. Et en apprenant leur mort, les apostats de tous pays pousseront des cris de joie, se féliciteront de leur triomphe et s’enverront des présents les uns aux autres, heureux d’être enfin délivrés des deux prophètes qui accablaient de tourments tous les habitants de la terre.

Mais voilà qu’aux chants d’allégresse succèdent tout à coup des cris d’épouvante. « Après trois jours et demi, continue l’apôtre, l’esprit de vie rentre dans les cadavres des deux prophètes. » Énoch et Élie se relèvent sur leurs pieds, en présence des apostats terrifiés. Une voix, la voix de Dieu, crie du haut du ciel : « Montez ici », et les deux témoins, enveloppés dans une nuée, s’élancent vers les cieux, à la vue de leurs ennemis. En même temps, la terre tremble sur ses bases, les villes s’écroulent, ensevelissant sous leurs ruines des millions d’hommes, les bons rendent gloire à Dieu, les méchants périssent dans un dernier combat [13].

Le Roi des rois

Christ RoiSaint Jean assista, dans une vision, à la victoire du triomphateur.

Je vis le ciel ouvert, dit-il, et bientôt apparaître le Fidèle, le Véridique, celui qui juge et combat avec justice. Ses yeux lançaient des flammes, sa tête portait grand nombre de diadèmes, sa robe était teinte de son sang : il s’appelait le Verbe de Dieu. De sa bouche sortait un glaive, le glaive avec lequel il frappe les nations. Sur son vêtement on lisait ces mots : « Roi des rois et Seigneur des seigneurs ». Et je vis alors la Bête, l’Antéchrist, les rois de la terre, et leurs armées, rassemblés pour combattre le Verbe de Dieu. Et la Bête fut prise, et avec elle le faux prophète qui avait fait des prodiges en sa présence, prodiges de séduction qui décidèrent les apostats à recevoir le caractère de la Bête et à l’adorer. Tous deux furent précipités, vivants, dans l’étang de soufre et de feu ; leurs armées tombèrent sous le glaive du vainqueur [14]

pendant que les armées angéliques entonnaient ce chant de triomphe : « Le royaume du monde est devenu le royaume de notre Seigneur et de son Christ [15] »

Conversion des nations

C’était la proclamation solennelle de la royauté du Christ sur tous les peuples de la terre. Réveillés aux éclats du tonnerre, illuminés par l’Esprit-Saint, les peuples reconnaîtront la puissance souveraine du Fils unique de Dieu. En voyant Jésus anéantir d’un souffle de sa bouche cet Antéchrist, ce roi des nations qu’ils avaient pris pour leur Messie, les Juifs frémiront d’horreur au souvenir de leur déicide, se donneront corps et âme au Dieu qu’ils ont crucifié, et deviendront les plus ardents propagateurs de son royaume. « Leur réprobation, dit saint Paul, a été l’occasion de la conversion des Gentils : que ne produira pas leur rappel ? Ce sera comme une vie nouvelle, une résurrection d’entre les morts. » Les nations, trop longtemps victimes des suppôts de Satan, des hérétiques, des apostats, de tous les Antéchrists sortis des sociétés secrètes, maudiront ceux qui les ont trompés et jureront fidélité au Seigneur Jésus. Juifs et Gentils, unis dans la même foi et le même amour, porteront l’Évangile à tous les peuples qu’éclaire le soleil. Tous tomberont au pied de la croix, adoreront Celui qui a donné son sang pour le salut du monde, et il n’y aura plus, selon la prédiction du Maître, qu’un seul troupeau et un seul pasteur,

Et Jésus régnera sur cette terre aussi longtemps qu’il n’aura pas complété le nombre de ses élus. Combien d’années ? Combien de siècles ? C’est un secret qu’il n’a révélé à personne. Tout ce que nous savons par ses dernières prédictions, c’est qu’un jour l’agonie du monde sonnera. « Des signes célestes annonceront le grand cataclysme. Et, voyant la terre trembler sur ses bases, en entendant les mugissements de la mer et des flots, les hommes sécheront d’épouvante [16]. »

Le soleil deviendra noir comme un cilice, la lune rouge comme le sang, les étoiles tomberont du ciel. Les rois de la terre, les princes, les tribuns, les riches, les puissants, aussi bien que les pauvres ou les esclaves, se cacheront dans les cavernes et dans les rochers des montagnes, et ils diront aux rochers et aux montagnes : Tombez sur nous et dérobez-nous à la colère de l’Agneau, car le grand jour de la colère est arrivé ; et qui pourra subsister ? [17]

Et au milieu de ces affreux bouleversements, au milieu des éclairs et des tonnerres, le feu dévorera la terre et tout ce qui est sur la terre. Au son de la trompette angélique, les morts sortiront du tombeau, l’enfer vomira les damnés, du ciel descendront les saints, et toutes les âmes de ceux qui ont vécu ici-bas, réunies à leur corps, se rassembleront pour assister au dernier jugement.

Dernier jugement

Jugement dernier - Hans HemlingAlors aura lieu le second avènement, l’avènement glorieux du Sauveur. Jésus, entouré de ses anges, descendra sur les nuées du ciel, l’étendard de la croix à la main, pour juger tous les hommes et rendre à chacun selon ses œuvres, comme il l’a promis pendant sa vie mortelle. Il commandera aux anges de placer les bons à sa droite et les méchants à sa gauche.

Et quand le souverain Juge verra réunis à sa gauche ses millions et milliards d’ennemis, les Judas, les Caïphes, les Pilates, les Hérodes de tous les siècles, qui l’ont attaché à la croix ; les négateurs de sa divinité, les hérétiques, les apostats, les antéchrists, qui, pendant des milliers d’années, ont persécuté son Église et martyrisé ses enfants ; les impies, les débauchés, les voleurs, qui ont tourné en dérision sa doctrine et foulé aux pieds ses commandements ; quand il verra, dis-je, cloués à l’infâme pilori ces insulteurs de sa royauté, des éclairs jailliront de ses yeux, pénétrant jusqu’au fond des consciences, et manifesteront à tous les crimes révoltants de ces suppôts de l’enfer. Et quand le supplice de la honte aura comme anéanti ces hommes autrefois si hardis contre Dieu, Jésus prononcera contre eux la terrible sentence : « Vous n’avez pas voulu que je règne sur vous, eh bien ! éloignez-vous de moi, maudits, allez au feu éternel, allez rejoindre Satan, votre maître, dans cet enfer créé pour lui, et que vous avez mérité comme lui. »

Et ils descendront dans l’abîme des douleurs en poussant des cris de désespoir. « Insensés que nous sommes ! s’écrieront-ils, nous avons donc erré hors des sentiers de la vérité. La lumière de la justice n’a pas lui à nos yeux, le soleil de l’intelligence ne s’est pas levé sur nous ! » Ainsi se jugeront eux-mêmes, au fond des enfers, ces sages de la terre qui insultaient et outrageaient les saints de Dieu.

Jésus alors s’adressant à l’armée des fidèles, à ceux qui ont confessé son saint nom devant les hommes, pratiqué ses commandements, affronté la persécution par amour pour leur Roi et leur Dieu, prononcera l’arrêt de la divine justice : « Venez, les bénis de mon Père, prenez possession du royaume qui vous a été préparé dès le commencement du monde. » Et les élus et les anges, à la suite de Jésus, entreront dans le paradis de délices, où, assis sur des trônes autour du divin Roi, ils jouiront éternellement de sa gloire.

Et j’entendis, s’écrie l’apôtre bien-aimé, une grande voix sortant du trône de l’Éternel. Voici le tabernacle de Dieu avec les hommes, disait la voix. Il demeurera avec eux, ils seront son peuple, et il sera leur Dieu. Le Seigneur essuiera les larmes de leurs yeux, et il n’y aura désormais ni mort, ni travail, ni larmes, ni douleur [18].

Et dans les siècles des siècles Jésus-Christ, le souverain triomphateur, régnera dans le ciel avec ses anges et ses saints, et tiendra sous ses pieds, dans les flammes éternelles, les démons et les réprouvés.

Père Augustin Berthe, Jésus-Christ, sa vie, sa passion, son triomphe,
Paris, 1926, p. 500-514.

Le Père Augustin Berthe (religieux rédemptoriste, 1830-1907) est aussi l’auteur d’une vie de saint Alphonse de Liguori, et d’une biographie de Garcia Moreno (président de l’Équateur, assassiné en 1875 par la Franc-Maçonnerie). — Ami de Mgr Delassus, il lui écrivait le 15 avril 1899 : « Malheur au monde si l’Amérique devient, comme on nous le prédit, la conquérante des peuples et l’institutrice des siècles à venir […]. Ce pays de tous les cultes et de toutes les libertés décomposera de plus en plus toutes les religions pour les fondre dans l’alliance universelle prêchée par Israël. » (Lettre citée dans Mgr Delassus, p.172-176)

[1] Matth., XXIV, 21
[2] II Thessal., II , 7.
[3] II Timoth., IV,3-4
[4] II Thessal., II , 3-4.
[5] II Thessal., II , 7.
[6] Léon XIII, Encyclique du 15 octobre 1890
[7] Lettre du cardinal Lavigerie à son clergé, 1er septembre 1889
[8] Joan., XVI, 33.
[9] Matth., XXIV, 21-24
[10] III Thessal., II , 3-10.
[11] Apocal. XII,1-17
[12] Apocal. XVI,passim
[13] Apocal. XI, 7-13
[14] Apocal. XIX, 11-21
[15] Apocal. XI, 13
[16] Luc . XXI, 25-26
[17] Apocal. VI, 13-17
[18] Apocal. XXI, 3-4