Avr 4

Septième lettre circulaire des membres de la Société de Jésus couronné d’épines

Pie XIIMesdames, mesdemoiselles,

Voici quelques nouvelles.

Réunion du 1er (et du 4) avril 2017

C’est déjà la 3ème réunion de notre société avec le livre Le Problème moral et pédagogique de la mode, Enseignements Pontificaux, commentés par Elisabeth van HECKE.

Après avoir posé les fondements concernant la dignité du corps humain et la morale chrétienne, nous avons consacré notre dernière réunion au sujet de la triple finalité du vêtement.

Le texte de S.S. Pie XII, qui a servi de base à notre étude est tiré de son Allocution aux Membres du premier Congrès international de la Haute Couture, tenu à Rome, le 8 novembre 1957. Le voici :

Suivant le conseil de la sagesse antique qui indique dans la finalité des choses le critère suprême de tout jugement théorique et la sûreté des normes morales, il sera utile de se rappeler les buts que l’homme s’est toujours fixés en recourant au vêtement.

Sans aucun doute, il obéit aux trois exigences bien connues de l’hygiène, de la pudeur et de la bonne présentation (ou de la bienséance). Ce sont trois nécessités si profondément enracinées dans la nature, qu’elles ne peuvent être ignorées ni contrariées sans provoquer répulsion et préjudice.

Elles conservent leur caractère de nécessité aujourd’hui comme hier ; elles se trouvent chez presque toutes les races ; elles se révèlent sous toutes les formes de la vaste gamme, dans laquelle la nécessité naturelle du vêtement s’est concrétisée historiquement et ethnologiquement. Il est important de noter l’interdépendance étroite et solidaire entre les trois exigences, bien qu’elles résultent de sources diverses : l’une du côté physique, l’autre du côté spirituel, la troisième de l’ensemble psychologique et artistique (ou esthétique).

Hygiène, pudeur, bonne présentation, voilà les trois exigences commandant la nécessité du vêtement ; toutes les trois bien enracinées dans la nature humaine,  toutes les trois inséparables, solidaires l’un de l’autre, toutes les trois répondant ensemble à la triple finalité du vêtement. Voyons rapidement chacune d’elle.

1. L’HYGIENE

Il est clair que la nécessité du vêtement, sur le plan de l’hygiène (c’est-à-dire de tout l’ensemble des principes, des pratiques individuelles ou collectives visant à la conservation de la santé, au fonctionnement normal de l’organisme, dit sagement le dictionnaire Larousse), découle principalement des variations des conditions météorologiques (autre est la manière de s’habiller d’un esquimau et autre celle d’un africain ; même en Anjou on s’habille différemment en été et en automne).

Mais, nous l’avons vu, les trois éléments concourent à la nécessité du vêtement.

Un prétexte d’hygiène ne peut permettre de transgresser les lois de la pudeur ; par exemple s’habiller conformément au climat ne peut pas donner le prétexte pour justifier une licence déplorable, particulièrement en public et hors des cas exceptionnels de réelle nécessité [1], en s’habillant en été plus légèrement que nécessaire.

De l’autre côté, un prétexte esthétique ne peut davantage aller à l’encontre des règles de l’hygiène. Prenons l’exemple du corset. Il permettait l’affinement de la taille (effet esthétique) mais son port comportait de nombreuses effets secondaires, nuisibles à la santé, à l’hygiène, entre autres la constriction des organes internes, Capacités pulmonaire et stomacale diminuée,  l’atrophie musculaire etc.

Encore une fois, la loi supérieure de la pudeur doit s’allier avec celles de l’hygiène et de la bonne présentation.

2. LA PUDEUR

Mais qu’est-ce que la pudeur ?

Au sens large c’est tout ce qui touche à l’intimité, au secret de la personne (sentiments, misères…) ; elle comprend également ce qui, dans le domaine physique, n’est pas à exposer aux yeux d’autrui.

Au sens strictement moral, la pudeur se fonde sur … :

la tendance innée et plus ou moins consciente de chacun à défendre contre la cupidité générale d’autrui un bien physique personnel, afin de le réserver, avec un prudent choix de circonstances, aux sages buts du Créateur, placés par lui sous la protection de la chasteté et de la pudicité. [2]

La grâce ne supprime pas ce sentiment inné, mais l’élève au plan surnaturel, au plan de l’amour de Dieu. De la sorte, il reçoit comme un nouvel éclat, une nouvelle force, qui perfectionne la nature, qui infuse dans l’âme comme un sens qui la met en garde vigilante contre les dangers qui menacent la pureté. Pie XII l’illustre par l’exemple des deux saintes martyres :

On lit dans la Passion des saintes Perpétue et Félicité, (…), que, lorsque dans l’amphithéâtre de Carthage la martyre Perpétue lancée en l’air par une vache très féroce retomba dans l’arène, son premier soin et son premier geste furent de rajuster sa tunique, qui s’était déchirée, sur le flanc pour le recouvrir, plus attentive encore à la pudeur qu’à la douleur, pudoris potius memor quam doloris [3].

Cependant le sentiment inné de pudeur, si noble qu’il puisse être, n’est au départ qu’une disposition. Comme le gland destiné à devenir le chêne, il faut que cet instinct de pudeur se développe en vertu de pudicité ou modestie, et comment ? En obéissant à la voix du respect et de la sainte tempérance.

S.S. Pie XII appelle la vertu de pudeur le bastion naturel de la chasteté, son solide rempart [4]. Celle-là nous fait remarquer spontanément ce qui, dans notre attitude intérieure en face de certaines pensées ou imagination, comme dans notre comportement extérieur, peut être nuisible à l’intégrité de la chasteté [5]. Et la chasteté chrétienne, d’après le Père Häring, n’est rien d’autre que la parfaite maîtrise de la fonction génératrice, dans un respect sacré, inspiré par la charité [6] ; vertu universelle, aussi bien pour les gens mariés que les célibataires.

Mais laquelle des trois, hygiène, pudeur ou bonne présentation, est la plus importante ?

  • L’hygiène relève de l’ordre physique…ce ne sont que des règles relatives à la conservation de la santé, santé du corps ; ordre le moins élevé.
  • La bonne présentation dépend de tout un complexe psychologico-esthétique; ordre se plaçant plus haut que celui d’hygiène. Mais on peut monter encore plus haut…
  • La pudeur a primauté sur les deux autres exigences, parce que, seule, elle est d’ordre spirituel.

Par conséquent, c’est en tant qu’enfant de Dieu que la femme ou la jeune fille chrétienne, aussi que tout homme qui se dit chrétien, veulent s’habiller. Le corps, que le vêtement couvre, est lui-même membre du Christ, temple du Saint-Esprit.

3. BONNE PRESENTATION

Et voici la troisième finalité du vêtement, dont la mode tire plus directement son origine ; elle répond à l’exigence innée, sentie surtout chez la femme, de donner du relief à la beauté et à la dignité de la personne, avec les moyens mêmes qui pourvoient à satisfaire les deux autres. Pour éviter de restreindre l’ampleur de cette troisième exigence à la seule beauté physique et, plus encore, pour soustraire le phénomène de la mode à l’ardent désir de séduction comme sa première et unique cause, le terme bonne présentation est préférable à celui d’ornement. L’inclination au bon aspect de la personne elle-même provient manifestement de la nature et est par conséquent légitime [7].

Trois arguments en faveur de cette bonne présentation :

  1.  pour rendre gloire à Dieu, qui nous a donné notre corps,
  2. pour embellir le monde et réjouir notre prochain,
  3. pour être d’autant mieux instrument de l’Esprit-Saint.

Enfin, en quoi consiste cette bonne présentation ?

Pour la jeunesse, ce qu’elle demande au vêtement c’est …

…ce relief de splendeur, qui chante le joyeux thème du printemps de la vie et facilite, en harmonie avec les préceptes de la pudicité, les prémisses psychologiques nécessaires à la formation de nouvelles familles [8].

A une autre occasion Pie XII dira à des jeunes filles :

Pureté et force : ces deux vertus, nécessaires en tout temps, mais plus que jamais dans le nôtre, sont, les deux ensembles, le véritable charme et la protection de la jeune fille qui réunit en elle la grâce et la dignité, la retenue pleine de modestie et la franche et audacieuse activité…Vous, chères filles, (…) n’oubliez pas que cette pureté et cette candeur doivent vous préparer aux devoirs de demain, vous soutenir, d’ores et déjà, dans les rudes devoirs d’aujourd’hui. Ce n’est pas tout d’un coup que Marie se trouva prête à dire sont Fiat ; elle s’y était préparée par sa force d’âme non moins que par sa pureté [9].

Et pour l’âge mur ?

…il entend obtenir du vêtement approprié un aspect de dignité, de sérieux et de joie sereine. Dans tous les cas où l’on cherche à accentuer la beauté morale de la personne, la coupe du vêtement sera de nature à éclipser presque la beauté physique dans l’ombre austère où elle se cache, pour détourner d’elle l’attention des sens et concentrer au contraire la réflexion sur l’esprit [10].

Pour méditer là-dessus nous vous proposons la parabole de la femme forte (Prov., 31, 10-30).

Si vous voulez avoir l’intégralité de la dernière conférence, vous pouvez la télécharger à l’adresse suivante : http://www.dominicainsavrille.fr/conferences-de-la-societe-jesus-couronne-depines/

N’hésitez pas à y inviter vos connaissances qui seraient intéressées au sujet de la modestie (ou qui devraient l’être). Soyez bien fidèles à votre petit engagement quotidien : l’invocation Notre‑Dame de la Sainte Espérance convertissez-nous + Ave Maria + Notre‑Dame de la Sainte Espérance convertissez-nous. N’oubliez pas non plus de donner, partout et toujours, un bon exemple de la modestie chrétienne dans la tenue extérieure.

Au pied de l’autel et de l’Immaculée : Frère Hyacinthe-Marie OP

[1] Op. cit.
[2] Op. cit.
[3] Allocution aux jeunes filles de l’Action Catholique, 6 octobre 1940.
[4] Allocution du 8 novembre 1957, cité ci-dessus.
[5] B. Häring, C.ss.R., La Loi du Christ, vol. III, p. 406.
[6] Op. cit., pp. 404-405.
[7] Allocution du 8 novembre 1957, cité ci-dessus.
[8] Op. cit.
[9] Allocution aux Enfants de Marie, 25 octobre 1942.
[10] Allocution du 8 novembre 1957, cité ci-dessus.