Confesseur de l’Ordre dominicain
Messe : Os justi
Évangile : Designavit
Oraison : « Dieu, qui, pour l’accroissement de la foi, avez fait du bienheureux Jean un prédicateur remarquable de votre parole, accordez-nous, par son intercession, de confesser de bouche pour notre salut ce que nous croyons de cœur pour notre justification ».
Jean, né à Salerne de la famille des Guarna, issue des anciens Normands, fut admis à Bologne dans la famille des Frères Prêcheurs, et c’est des mains du bienheureux Dominique qu’il reçut l’habit religieux. Sous sa conduite et avec ses leçons, Jean fit de tels progrès dans les voies de la vertu et de la perfection religieuse, que le saint fondateur, lorsqu’il envoya douze hommes des plus éprouvés pour propager son Ordre en Toscane, plaça Jean à leur tête, quoique l’on puisse à bon droit conjecturer qu’il était alors assez jeune.
Obéissant aux ordres du Père très saint, il prit la direction de Florence. Il se fixa d’abord à Ripoli, à trois milles environ de Florence, dans une maison qui leur avait été préparée par un pieux citoyen florentin, près d’une chapelle édifiée par les soins de ce bienfaiteur. De là, le saint homme venait chaque jour à Florence. Par la prédication assidue de la parole de Dieu, par la pureté de sa vie, il s’attacha profondément les âmes des Florentins, qui voyaient des hommes perdus retrouver le chemin du salut et les autres s’affermir dans le bien grâce à ses exhortations et à ses conseils. Cependant les magistrats de la cité, voyant l’inconvénient qu’il y avait pour le bienheureux à se rendre chaque matin de bonne heure à Florence et à regagner chaque soir la maison de Ripoli, firent le projet de lui procurer une demeure où il pût habiter avec ses frères à l’intérieur même de la ville. C’est ainsi qu’on leur donna une maison régulière, d’abord à Saint-Pancrace, puis à Saint-Paul et enfin à Sainte-Marie-Nouvelle ou des Vignes.
Dans cet endroit où les largesses des âmes pieuses avaient permis d’agrandir l’église et de bâtir le couvent, les nouveaux Frères Prêcheurs vécurent désormais dans une observance plus stricte des règles de leur Ordre. Par son exemple, Jean leur montrait la voie à tous ; par son abstinence continuelle, par le mépris de soi-même et la mortification, par son application quotidienne à l’oraison, par la contemplation des choses divines qu’il prolongeait plusieurs heures durant (pendant la nuit surtout), par la ferveur de sa dévotion, par la plus scrupuleuse observance des cérémonies dans la célébration des saints Mystères, par la pratique de toutes les autres vertus qui conviennent au plus haut point à un homme chargé de conduire les autres, il entraînait puissamment ses frères à l’imiter et à pratiquer de façon plus parfaite l’observance régulière.
Il fut caractérisé par une éminente chasteté de corps et d’âme. A quel degré brilla en lui cette vertu, Dieu le manifesta par un fait prodigieux : comme il avait été vainement tenté par une femme impudique, alors que, dans sa remarquable humilité, il s’efforçait de tenir secrète sa victoire sur l’esprit impur, le démon lui-même, sur l’ordre de Dieu, révéla toute l’affaire par la bouche d’un possédé. Le démon, en effet, se refusait à rendre la liberté à sa victime, s’il n’en était chassé par celui-là même qui était resté intact au milieu du feu. On appela le serviteur de Dieu, et, sur son ordre, l’esprit mauvais, en déchirant cruellement le malade, le quitta sur-le-champ.
Ce prodige et d’autres encore, ainsi que le don de guérison qui, diton, lui fut octroyé par Dieu, firent que plusieurs hommes, illustres par l’éclat de leur naissance, par la renommée de leur science et leurs dignités dans
l’Église, sollicitèrent la faveur d’être admis par lui dans l’Ordre et y furent effectivement reçus. L’un d’eux scella de son sang sa foi chrétienne ; deux autres furent, dans la suite, placés à la tête d’importants diocèses d’Italie.
Lorsque saint Dominique fut sur le point de mourir, Jean, en fils soumis et très aimant, se rendit à Bologne pour rendre les derniers devoirs à ce père très bon. Puis, de retour à Florence, mandé par le Souverain Pontife Grégoire IX, il se dressa contre les hérétiques Patarins, funeste descendance des Manichéens, qui troublaient l’ordre de l’Église et de l’État, brisa leur audace, et après avoir supporté héroïquement les injures et les opprobres par lesquels ils s’efforçaient de le détourner de son projet, protégea remarquablement la foi catholique. Sur l’ordre du même Pontife, il poussa vigoureusement la réforme des moines de Saint-Anthime, au diocèse de Chiusi. Dans la maison de Ripoli qui avait été sa première résidence à son arrivée en Toscane, il établit un monastère de religieuses de son Ordre.
Épuisé par les innombrables travaux entrepris pour le bien de l’Église et le développement de la foi, après avoir gouverné pendant plusieurs années le couvent de Sainte-Marie-Nouvelle pour le plus grand profit des Frères et celui des Florentins, il sentit approcher son dernier jour. Il le vit venir avec joie, et exhorta ses frères, qu’il avait avertis à l’avance de sa mort, à vivre saintement et à être très fidèles au culte divin ; puis, purifié par les sacrements de l’Église, il mourut très saintement.
Son tombeau devint bientôt un lieu de pèlerinage très fréquenté. Les foules invoquaient son secours, et, se déclarant exaucées, elles lui décernaient le culte des Bienheureux. Ce culte s’étant répandu sans interruption jusqu’à nos jours, le Souverain Pontife Pie VI l’approuva le 2 avril 1783, et daigna accorder à l’Ordre entier des Prêcheurs la faculté de célébrer l’office et la messe en l’honneur du bienheureux Jean.