Il convenait de fêter saint Pierre tout seul, puisque seul il a reçu de Notre-Seigneur, la suprême autorité. Mais comment oublier saint Paul même en fêtant saint Pierre ?
Il fallait revenir à cette glorieuse mémoire et ne pas séparer ceux que l’amour de Dieu a unis.
C’est la raison de cette fête de supplément, consacrée exclusivement à l’Apôtre des Nations.
Introït : « Je sais en qui j’ai eu foi, et j’ai la conviction qu’il peut garder mon dépôt jusqu’au jour où il viendra comme juste Juge. — Elle est préparée pour moi la couronne de justice ».
Paul écrit ces lignes à Timothée. Il a combattu pour le Christ, il a souffert pour le Christ, il a travaillé plus que tout autre pour le Christ. Maintenant son œuvre s’achève, la journée du grand ouvrier de la Rédemption se termine, il regarde le chemin parcouru et, heureux dans son cœur, heureux de voir que son Maître bien aimé est déjà connu et aimé dans tout l’empire romain et au-delà, Paul remercie la bonté de Dieu de l’œuvre qu’elle a accomplie par lui. Il n’a plus qu’à mourir, sûr de sa foi, sûr de la récompense qui lui est réservée.
Oraison : « Dieu, qui avez enseigné la multitude des nations par la prédication du bienheureux Apôtre Paul, accordez-nous de jouir de la protection de celui dont nous célébrons le jour de naissance au ciel ».
Voilà l’œuvre accomplie : la multitude des nations convertie à la foi du Christ par la parole de Paul. Où n’a-t-il pas été ? L’amour du Christ le pousse, il a la sollicitude de toutes les Églises. S’il ne peut les visiter toutes, il leur écrit, il les presse. Les chrétientés d’Asie, de Macédoine, de Grèce, de Rome lui sont redevables ou de la foi ou du développement de la foi. Paul ne pense jamais à lui. Sa personne n’est plus rien. Il y a en lui un autre, Jésus. Depuis que Jésus s’est manifesté à lui sur le chemin de Damas, il a pris possession de son esprit, de son cœur, de sa vie. Je ne vis plus, non, ce n’est plus moi qui vis, c’est lui, c’est Jésus qui vit en moi. A la lettre c’était vrai. Paul ne pense qu’à Jésus, n’aime que Jésus. Et il le porte partout, dans la joie et la tristesse, dans la paix et la persécution, périls de la terre, périls de la mer, périls des voleurs, périls des faux frères, dans la faim, dans la soif, les supplices, rien n’arrête Paul. Il va et il ne s’arrêtera que sous la hache du licteur. Et il va toujours humble, se rappelant sans cesse que ce qu’il est, il l’est par la grâce de Dieu. Écoutons-le.
Épitre de saint Paul aux Galates, c. 1. : « Je vous le déclare, Frères, l’évangile que j’ai prêché n’est pas selon l’homme. Ce n’est pas d’un homme que je l’ai reçu ou appris, mais bien par révélation de Jésus- Christ.
Vous avez, en effet, entendu parler de ma conduite, autrefois, dans le Judaïsme. Je persécutais à outrance l’Église de Dieu et je la combattais, je surpassais dans le Judaïsme beaucoup de ceux de mon âge dans ma nation, j’étais plus jalousement attaché aux traditions de mes pères. Mais quand il plut à Celui qui m’a mis à part dès le sein de ma mère et qui m’a appelé par sa grâce, de révéler son Fils en moi, pour que je le prêche parmi les gentils, je ne m’occupai en aucune façon ni de la chair ni du sang. Je ne montai point à Jérusalem auprès de ceux qui avaient été Apôtres avant moi, mais j’allai en Arabie et de nouveau je revins à Damas. Ensuite, trois ans plus tard, je montai à Jérusalem pour voir Pierre et je demeurai auprès de lui pendant 15 jours. Je ne vis aucun autre apôtre, sauf Jacques, le frère du Seigneur. Ce que je vous écris là. Dieu sait que ce n’est point un mensonge. »
Paul garde dans son cœur la conscience profonde de tout ce que Dieu a fait pour lui. Il sait ce qu’il était, il sait aussi ce qu’il est devenu. Tout en lui vient de Dieu. Il le confesse de toute son âme, à la louange de la grâce de Dieu.
Graduel : « Ce que Dieu a fait par Pierre dans l’Apostolat, il l’a fait par moi au milieu des nations et tous savent la grâce que Dieu m’a accordée. — La grâce de Dieu n’a pas été stérile en moi. La grâce demeure toujours en moi. »
Alléluia, Alléluia : « le grand saint Paul, ce vase d’élection, est digne d’être glorifié noblement ».
Saint Paul ne connaît qu’une force de vie en lui, la grâce de Dieu. Il ne se targue ni de science, ni d’éloquence, moi, dit-il, je prêche Jésus crucifié, et j’appuis ma prédication, non sur les raisonnements ou la littérature, mais sur la force de Dieu. Il a conscience que seule la grâce de Dieu a fait l’œuvre accomplie par lui. « Je suis ce que je suis par la grâce de Dieu ».
Force merveilleuse, force unique pour le salut des âmes. Toutes forces humaines sans elle sont inopérantes.
Évangile selon saint Matthieu, c. 10. : « Voici que je vous envoie comme des brebis au milieu des loups. Soyez donc prudents comme des serpents, et simples comme des colombes. Prenez garde aux hommes. Ils vous traîneront dans leurs assemblées, ils vous fouetteront dans leurs synagogues. Vous serez conduits à cause de moi devant les magistrats et les rois pour me rendre témoignage devant eux et devant les nations. Quand ils vous feront comparaître, ne vous préoccupez pas de la manière de leur répondre ni de ce que vous direz, il vous sera révélé à ce moment-là ce que vous devez dire. Car ce n’cst pas vous qui parlerez, mais l’Esprit de votre Père parlera en vous.
Le frère livrera son frère à la mort, le père son fils et les enfants se révolteront contre leurs parents et les mettront à mort. Et vous serez un objet de haine pour tous à cause de mon nom. Mais celui qui persévérera jusqu’à la fin sera sauvé. »
Paul a réalisé tout cet évangile. Sa vie ne fut qu’un long et dur tourment pour le Nom de Jésus. Mais ce tourment était sa joie : faire connaître Jésus aux peuples, le faire aimer, c’était son bonheur infini. Le reste lui importait peu. « Qui me séparera de l’amour du Christ ? La tribulation ? L’angoisse ? La persécution ? La faim ? La nudité ? Le péril ? Le glaive ? Selon ce qui est écrit : A cause de toi nous sommes mis à mort tout le jour. On nous regarde comme des brebis de boucherie. Mais en tout cela nous sommes plus que vainqueurs grâce à celui qui nous a aimés. Oui, je vous assure que ni mort ni vie, ni anges, ni principautés, ni choses présentes, ni choses futures, ni puissances, ni hauteur, ni profondeur, ni rien de créé ne pourra nous séparer de l’amour de Dieu qui est dans le Christ Jésus, Notre Seigneur ».
C’est le défi suprême de l’amour. Paul tint ce défi, jusqu’au glaive du licteur.
Offertoire : « Dieu, vos amis sont en grand honneur, leur principat s’est affermi puissamment ».
Secrète : « Ces offrandes, Seigneur, que nous vous présentons pour être consacrées à votre. Nom, que la prière de votre Apôtre les accompagne afin qu’elles soient pour nous l’expiation de nos fautes et notre protection ».
Communion : « Je vous le dis en vérité, vous, qui avez tout quitté et qui m’avez suivi, vous recevrez le centuple et vous posséderez la vie éternelle ».
Postcommunion : « Après avoir reçu ces sacrements, nous vous demandons, Seigneur, par l’intercession du bienheureux Paul, votre apôtre, que les fêtes célébrées pour le glorifier, servent à notre salut ».
Paul fut conduit, comme je l’ai dit, par la Voie d’Ostie, jusqu’aux Eaux Salviennes, un peu à l’écart de la voie. Plautilla, sœur de Flavius Clemens, qui devint consul sous Domitien, et mère de Domitilla, une autre martyre, accourut pour implorer sa bénédiction. Elle pleurait. Paul lui demanda son voile pour s’en couvrir les yeux au moment du supplice. Le grand Apôtre fut décapité sur une borne milliaire. Sa tête fit trois bonds, et trois fontaines jaillirent aux endroits où elle toucha la terre.
D’où le nom de l’Abbaye de Saint-Paul-aux- trois-fontaines qui consacre ce souvenir.
Une chrétienne, Lucina, noble matrone de famille sénatoriale, possédait une villa à la distance environ de deux milles des Eaux Salviennes, sur la Voie d’Ostie. Elle rendit les derniers honneurs à son père dans la foi et transporta son corps dans sa villa. Il y est toujours. Au-dessus de son tombeau s’élève la splendide basilique de Saint-Paul-hors-les-Murs.
Il fait bon s’agenouiller près de ce tombeau. On y apprend à aimer au-dessus de tout celui dont Paul dans ses lettres redit souvent avec tendresse le Nom béni : Notre-Seigneur Jésus- Christ.