Cette fête a un double sens. Elle solennise d’abord l’Exaltation de la croix quand Jésus cloué atrocement sur ce gibet par les pieds et les mains fut élevé, exalté, entre la terre et le ciel. Moment unique dans l’histoire du monde, dans l’œuvre surtout du salut des âmes. Tout le ciel était présent et regardait. Le Crucifié apparaissait pour la première fois dans l’horreur de son supplice et la majesté de son amour. C’est lui ! Regardons-le bien. Il est entre la terre et le ciel, pour relier les deux, faire l’éternelle union. Il étend ses bras comme à l’infini, pour embrasser le monde entier.
« Quand je serai exalté, avait-il dit, en pensant à ce moment solennel, quand je serai élevé de terre, j’attirerai tout à moi ». Attirez, Seigneur Jésus, aimant divin, attirez-nous, arrachez-nous à la terre. Il fait meilleur près de vous.
Cette fête se rattache par ailleurs à un événement historique très important, qui lui donne son deuxième sens. Au temps de l’empereur Phocas, dans les commencements du VIIe siècle, le roi de Perse Chosroas, battit les troupes impériales, s’empara de Jérusalem et mit la main sur le bois de la Vraie Croix déposée par sainte Hélène dans la basilique du Calvaire. Perte douloureusement ressentie par les chrétiens.
Héraclius, successeur de Phocas, après bien des défaites, arriva cependant à mettre en fuite les troupes de Chosroas. Ce roi fut assassiné par un de ses fils qui implora la paix. Héraclius posa pour première condition que la Croix du Sauveur lui serait restituée. Il y avait quatorze ans que les Perses l’avaient emportée. Son retour à Jérusalem fut un triomphe. Héraclius voulut la porter lui-même au Calvaire. Mais une force invincible le retint à la porte de la ville. L’évêque de Jérusalem lui représenta que la richesse de ses ornements impériaux allait mal avec la Croix du Sauveur. Héraclius comprit, se dépouilla de ses riches vêtements et, vêtu comme un pauvre, il souleva la Croix et la porta facilement dans la basilique du Calvaire. C’est cette seconde et glorieuse Exaltation que nous célébrons aussi en ce jour.
La Messe
Introït : « Il faut nous glorifier nous autres dans la croix de Notre-Seigneur Jésus-Christ, en qui est salut, vie et résurrection pour nous, par qui nous avons été sauvés et délivrés. — Que Dieu ait pitié de nous, qu’il nous
bénisse, qu’il répande sur nous la lumière de son visage et qu’il ait pitié de nous ».
Toute gloire vient pour nous de la Croix du Sauveur Jésus, tout bien : le salut éternel, la vie de joie pour l’âme et pour le corps. Tout, absolument tout vient de la croix, car il est impossible de recevoir quelque chose de Dieu en dehors de la croix. C’est Jésus crucifié qui mérite toute grâce de Dieu. La grâce suprême, qui est la vie éternelle avec Dieu, est un fruit de la croix. Rien de Dieu, sans elle.
Oraison : « Dieu, qui nous réjouissez aujourd’hui par la solennité annuelle de l’Exaltation de la sainte Croix, faites, nous vous en prions, qu’ayant connu son mystère sur la terre, nous puissions posséder dans le ciel le fruit de sa Rédemption ».
Épître de saint Paul aux Philippiens, c. 2. : « Frères, le Christ s’est fait pour nous obéissant jusqu’à la mort, et la mort de la croix. C’est pourquoi, Dieu l’a exalté et lui a donné un nom, qui est au-dessus de tous les noms, afin que, au Nom de Jésus tout genou fléchisse au ciel, sur terre et dans l’enfer, et que toute langue confesse que le Seigneur Jésus-Christ est dans la gloire de Dieu, son Père. »
Jésus, Fils de Dieu fait homme, a accepté l’ordre éternel de l’Auguste Trinité qui était de mourir, pour le salut du monde, sur une croix. Il a accepté cette suprême humiliation. Mais en retour, l’Auguste Trinité veut que celui qui s’est abaissé à ce point soit le plus élevé. Elle lui a donné un Nom, un Nom incommunicable, un Nom que seul le Fils de Dieu fait homme peut porter, le Nom de Jésus, le Sauveur, et à ce Nom tout est soumis, tout s’incline ou par amour ou par force. Jésus est le souverain du ciel, de la terre, de l’enfer. Partout il est le Fils de Dieu Sauveur et partout, de gré ou de force, on doit l’adorer et reconnaître ce qu’il est. Aucun être, qu’il le veuille ou non, n’échappe à cette adoration. Heureux ceux qui l’adorent par amour !
Graduel : « Le Christ s’est fait pour nous obéissant jusqu’à la mort, la mort même de la croix. — C’est pourquoi Dieu l’a exalté et lui a donné un Nom qui est au-dessus de tout nom. »
Alléluia, Alléluia : « Doux bois, doux clous, qui avez porté un doux poids, seuls vous fûtes jugés dignes de soutenir le roi des cieux, le Seigneur ».
Évangile selon saint Jean, c. 12. : « En ce temps-là, Jésus dit à la foule des Juifs : C’est maintenant que le monde va être jugé, maintenant que le prince du monde va être jeté dehors. Et moi, quand je serai élevé de terre, j’attirerai tout à moi. (Or il parlait ainsi en laissant entendre quel serait son genre de mort). La foule lui répondit : Nous savons par la Loi que le Christ doit demeurer éternellement. Comment donc pouvez-vous dire : Il faut que le Fils de l’homme soit élevé clans les airs ? Quel est donc ce Fils de l’homme ? Jésus leur dit : Vous avez encore pour un peu de temps la lumière au milieu de vous. Marchez donc, pendant que vous avez la lumière, afin que vous ne soyez pas surpris par les ténèbres. Car celui qui marche dans les ténèbres ne sait où il va. Pendant que vous avez la lumière, croyez en cette lumière, pour devenir des enfants de lumière. »
Offertoire : « Seigneur, protégez votre peuple, par le signe de la sainte Croix, de toutes les embûches de ses ennemis, afin que nous vous rendions un hommage agréable et que notre sacrifice soit acceptable à vos yeux ».
Secrète : « Seigneur, que cette offrande nous purifie de toutes nos fautes, elle qui sur l’autel de la croix, a effacé l’offense du monde entier ».
Ce que le sacrifice de la croix a fait pour le monde entier, le sacrifice de la messe peut le faire pour chacun de nous. C’est la même victime, Notre-Seigneur Jésus-Christ ; c’est le même sang qui coule de ses plaies. Nous le
présentons à Dieu pour l’appliquer à chacun de nos besoins comme le Christ Jésus l’a présenté pour le salut universel du monde. Mais la source du pardon et de la grâce pour nous est la même comme la louange à l’Auguste Trinité. Il n’y a pas deux sacrifices, il n’y a que l’unique sacrifice de la croix, continué par le sacrifice de la messe. Même Prêtre unique, Jésus, même victime unique, Jésus, le mode seul est différent.
Communion : « Notre Dieu, délivrez-nous de nos ennemis par le signe de la croix ».
Postcommunion : « Rassasiés par le pain et le breuvage célestes, nous vous demandons, Dieu tout-puissant, de nous défendre contre les menées de nos ennemis, nous que vous avez rachetés par le sang précieux de votre Fils. Notre- Seigneur Jésus-Christ ».
C’est notre unique défense. La croix seule est la terreur du démon, notre ennemi, parce que seule elle porte en elle la puissance du Créateur, et devant cette puissance le démon ne peut rien.