Messe
Introït : « Le Seigneur m’a appelé par mon nom dès le sein de ma mère. Il a fait de ma langue comme un glaive affilé. Il m’a mis sous sa main pour me protéger, et il m’a lancé comme une flèche choisie. — Iles, écoutez, peuples lointains, soyez attentifs : Le Seigneur m’a donné un nom dans le sein de ma mère ».
Tu l’appelleras Jean, dit l’ange Gabriel à Zacharie, quand il lui apparut près de l’autel qu’il encensait. Tu l’appelleras Jean, c’est-à-dire le Fils de la Colombe. Fils de la Colombe, Jean le fut quand, au Baptême de Jésus, la Colombe descendit du ciel, et cette Colombe était l’Esprit-Saint. Mais le fils de la Colombe avait pour mission, précisément, d’être le porte-voix de l’Esprit. Celui sur qui tu verras la colombe descendre c’est lui, le Fils de Dieu. Ta mission est de lui préparer les voies, de l’annoncer au peuple juif, à tous les peuples. Ta langue doit être une épée tranchante, elle doit proclamer sans hésitation, de façon absolue : voilà le Fils de Dieu, l’Agneau de Dieu, le Sauveur du monde. Je t’envoie dans le monde, comme une flèche aiguë. Va ! La flèche doit atteindre son but tout droit. Crie à tous : Voilà le Sauveur, le Messie promis, Jésus Fils de Dieu.
Oraison : « Dieu, qui avez fait ce jour honorable pour nous par la Nativité du bienheureux Jean, accordez à votre peuple la grâce des joies spirituelles et dirigez les cœurs de vos fidèles dans la voie du salut éternel ».
Jour de joie par excellence, cette naissance de Jean-Baptiste. Gabriel avait prédit cette joie, car la Naissance du Précurseur est comme l’aurore du salut du monde. Elle annonce, dans la fraîcheur aimable du matin, le lever prochain du divin soleil, Jésus. Jour de joie pour ceux qui vivent des espérances et des certitudes de la foi. Car rien ne donne une joie profonde comme la certitude d’être dans la vérité de Dieu.
Jour de joie ! Malgré les difficultés de la route à parcourir. Jean doit préparer cette route. A lui de briser les obstacles, d’aplanir le terrain, de déblayer les pierres. Ce service de divin cantonnier demeure toujours le même dans nos âmes. Il faut à Jésus, le souverain roi, une voie triomphale, doucement sablée, riche d’ornements. Il passe en chacun de nous : notre voie personnelle est-elle une voie de triomphe ? Avons-nous enlevé les pierres, aplani les aspérités ? L’avons-nous décorée d’ornements précieux ? Les pierres sont nos défauts, les ornements nos vertus. Où en sommes-nous ? Pauvre voie peut- être que la nôtre, pauvre cœur embroussaillé de mille passions, encombré de défauts. Le Maître, notre roi, a peine à se frayer un passage…
Lecture du prophète Isaïe, c. 49. : « Iles, écoutez, peuples lointains, soyez attentifs. Le Seigneur m’a donné un nom dans le sein de ma mère ; dès le sein de ma mère il s’est souvenu de mon Nom. Et il a fait de ma langue comme un glaive affilé. Il m’a mis sous la protection de sa main. Il m’a formé comme une flèche choisie, et il m’a caché dans son carquois. Il m’a dit : Israël, tu es mon serviteur : je me glorifierai en toi. Et maintenant le Seigneur me dit, en me formant dès le sein de ma mère, pour son serviteur : Je te place comme la lumière des nations, afin que tu sois mon salut jusqu’aux extrémités de la terre. Les rois te verront, les princes se lèveront devant toi et t’adoreront à cause du Seigneur et du Saint d’Israël qui t’a choisi ».
Graduel : « Avant de te former dans le sein de ta mère, je te connaissais. Avant que tu sortes du sein de ta mère, je t’ai sanctifié — Le Seigneur étendit la main et toucha ma bouche. »
Alléluia, Alléluia : « Parmi les fils de la femme, aucun ne s’est élevé plus haut que Jean-Baptiste, Alléluia ».
Avant d’être conçu, avant de naître, nous sommes connus de Dieu. De toute éternité, nous sommes dans sa pensée, dans son vouloir. Il nous connaît par notre nom, il prépare notre route, il dispose notre vie, il voit notre éternité. Nous sommes tous dans la main de Dieu et il se sert de nous, pour sa gloire, comme il le veut. Nous sommes comme une flèche dont il dispose à son gré, qu’il lance vers le but sans jamais le manquer. Mais parmi ces flèches, il y a celles de premier choix, comme Jean-Baptiste. Celles dont la mission ou le but a plus de grandeur et qui, par là même, sont destinées à rendre à Dieu une gloire plus grande. Chacun, à notre manière, rendons à Dieu toute la gloire qu’il attend de nous.
Évangile selon Saint Luc., c. 1. : « Le temps de l’enfantement d’Elisabeth arriva et elle mit au monde un fils. Ses voisins, ses parents apprirent que le Seigneur avait manifesté en elle sa miséricorde et ils l’en félicitèrent. Le huitième jour ils vinrent pour circoncire l’enfant et ils voulaient l’appeler du nom de son père, Zacharie. Et sa mère leur répondant, dit : Pas du tout, il s’appellera Jean. Ils lui dirent : Mais personne dans votre parenté ne porte ce nom. Et ils faisaient signe à son père pour qu’il montrât comment il voulait l’appeler. Il prit un stylet et écrivit : Jean est son nom. Et tous étaient dans l’étonnement. Mais aussitôt sa bouche s’ouvrit, sa langue fonctionna et il parla en bénissant Dieu. Tous les voisins furent remplis de crainte et le bruit de ces événements se répandit sur toutes les montagnes de la Judée. Chacun se demandait en soi-même et disait : Que pensez-vous que sera cet enfant ? Car la main du Seigneur était avec lui. Et Zacharie, son père, fut rempli du Saint-Esprit et il prophétisa en disant : Béni soit le Seigneur, Dieu d’Israël, car il a visité et sauvé son peuple. »
On assiste, en cet évangile, à tous les usages juifs pour la naissance d’un enfant. Pour une Juive, à cause de la promesse du Messie qui devait naître en Israël, demeurer sans enfant était une sorte de honte, comme une malédiction du Seigneur. C’est pourquoi, quand Elisabeth met au monde un fils, les voisins, les parents, en sont émus, ils la félicitent. La circoncision avait lieu à domicile, le huitième jour après la naissance. Les voisins, les parents sont là. C’est une fête familiale. A l’enfant circoncis on donne un nom. D’ordinaire, il est pris parmi ceux de la famille. Aussi veut-on l’appeler Zacharie, comme son père. Mais à l’étonnement général, Elisabeth, sa mère, s’y oppose. Elle sait par révélation du Saint-Esprit que l’enfant doit s’appeler Jean et elle le dit nettement. Idée tellement contraire à l’usage que les parents ne veulent pas l’accepter. Ce n’est pas à la mère de donner le nom, mais au père. Comme Zacharie était devenu muet, on le prie d’indiquer lui-même quel nom il préfère. Et lui aussi, à l’étonnement plus grand encore, écrit : Jean ! Il fallut bien se- rendre. Mais cette naissance plutôt extraordinaire, ces’ singularités éveillèrent l’attention et l’on se disait partout en Judée : Que sera donc cet enfant ? La pensée du Messie hantait les esprits. Ce n’était pas lui, mais celui qui le précédait et Zacharie chante, dans la certitude de la venue imminente du Messie : Béni soit Dieu, car enfin il a visité son peuple. Le salut est arrivé.
Offertoire : « Le juste fleurira comme le palmier, il grandira comme le cèdre du Liban ».
Secrète : « Seigneur, nous comblons vos autels d’offrandes pour célébrer avec tous les honneurs qui lui sont dus, la Nativité de celui qui a chanté la venue future du Sauveur du monde et l’a montré présent, Notre-Seigneur Jésus- Christ ».
Jean a chanté par les lèvres de Marie la venue prochaine du Sauveur, il l’a chantée par ses tressaillements de joie dans le sein de sa mère. Puis, plus tard, sur les bords du Jourdain, il l’a montré du doigt à la foule : le voici, c’est lui, l’Agneau de Dieu, le Sauveur, le Messie attendu.
Et comme il regardait avidement Jésus ! Il le voyait à la lumière de l’Esprit-Saint, tel qu’il était, Fils de Dieu et victime expiatoire pour le salut du monde. En l’appelant l’Agneau de Dieu, Jean laisse entendre que la Passion douloureuse de Jésus lui est présente. Il le voit immolé, sacrifié, sur la croix. Aussi quelle tendresse pour lui dans le cœur de Jean !
Cet homme à l’aspect rude, à la pénitence austère, aux paroles vengeresses de la justice, s’attendrit quand il parle de Jésus. C’est l’Époux, dit-il, c’est lui qui a l’épouse, moi je suis l’ami de l’époux. Oh ! Jean, comme vous avez dit cela avec douceur, en savourant délicieusement la suavité de ce titre : je suis l’ami de l’Époux. Il a refusé tous les titres de prophète, de messie et voici que de lui-même, il s’intitule l’ami de l’Époux. C’est son titre à lui, celui qu’il aime, celui qu’il préfère : Je suis son ami, l’ami de Jésus. Et je me réjouis de voir mon ami, et d’entendre la voix de mon ami. C’est la joie infinie de Jean. Hérode peut l’incarcérer, il peut lui trancher la tête, qu’importe : Jean a vu son ami Jésus, Fils de Dieu, Sauveur du monde, Jean a entendu sa voix, il peut mourir. Personne ne lui ôtera cette joie. Éternellement Jean s’appellera l’ami de l’Époux, l’ami de Jésus.
Communion : « Enfant, toi, tu seras appelé le Prophète du Très-Haut. Car tu marcheras devant la face du Seigneur pour préparer sa route ».
Prophète du Très-Haut, c’est le nom officiel de Jean, le nom qui dit sa mission. Mais il y en a un autre, celui de l’intimité, que lui-même a pris et qu’il garde à jamais : l’ami de l’Époux, ami respectueux, mais ami d’une tendresse infinie.
Postcommunion : « Dieu, que votre Église soit dans la joie, par la naissance du bienheureux Jean-Baptiste, par lui elle a connu l’Auteur de sa régénération, Notre-Seigneur Jésus-Christ, votre Fils ».
Tous les Précurseurs du Christ, tous ceux qui marchent devant sa face pour lui préparer sa marche à travers le monde, son entrée et son règne dans les âmes, doivent, comme Jean-Baptiste, être les Amis de l’Époux. Comment parler de lui avec efficacité, comment le faire connaître et le faire aimer, si on n’est pas uni de cœur avec lui ? Union intime qui exige le dégagement des choses de la terre et cette préoccupation constante de faire plaisir à l’Ami divin. Heureux ceux qui, comme Jean-Baptiste, mettent tout leur cœur dans le cœur de leur ami Jésus et toute leur joie dans la joie de le connaître et de l’aimer. Ce sont les vrais Précurseurs, les vrais Apôtres.