Mai 16

Sel de la terre ou sucre de la terre ?

Mgr de SégurNous vivons dans un temps où l’on n’assaisonne plus sa cuisine qu’au sucre ; il en résulte une fade piété de contrebande, qui n’est pas du tout selon le cœur de Jésus-Christ, ni selon l’esprit de l’Église.

On ne parle que d’amour sous couleur de christianisme et surtout de perfection ; la religion du Christ est toute d’amour. L’amour est sur les lèvres et dans les termes : il n’est ni au fond des cœurs ni au fond des choses.

Ou plutôt, cet amour auquel on donne une teinte de religion, est l’amour naturel, une sorte de mysticité naturelle, une enseigne ou un article d’exploitation. Et ces âmes qui ne chantent qu’amour pur, perfection éthérée vivent souvent dans l’affection au péché, ont horreur du moindre sacrifice, sont avides de toutes les satisfactions des sens et de tous les raffinements de la délicatesse.

C’est que l’amour chrétien, surnaturel, divin est le dernier épanouissement de la véritable crainte. Quand la racine manque, que peut être la fleur ?

Mgr Louis-Gaston de Ségur (1820-1881)